3juil
La FQSC perd un de ses immortels
vendredi, 3 juillet 2020La Fédération québécoise des sports cycliste vit un deuil depuis jeudi matin. Le paracycliste et grand ami de toute la communauté cycliste, Gary Longhi, nous a quitté jeudi matin vers 11h22. Ce pionnier du mouvement paracycliste québécois et canadien s'est éteint paisiblement à l'âge de 56 ans après avoir demandé de l'aide médicale à mourir, lui qui souffrait d'un cancer incurable. Cet homme au grand coeur et aimé de tous avait choisi le 2 juillet, le jour de sa fête, pour mettre fin à ses souffrances.
C'est le coeur lourd et les yeux humides qu'une quinzaine de proches de Gary Longhi lui ont adressé un dernier aurevoir mardi. L'initiative de son cousin, Marco Calliari, visait à faire une dernière sortie à vélo pour Gary. À cette occasion, le journaliste du Journal de Québec, Jean-François Racine, a couvert cet événement. Son texte dresse un portrait fidèle du grand champion qu'était Gary Longhi. Vous pouvez lire l'article ci-dessous :
Un message émouvant de sa famille
Instigateur de ce dernier rassemblement, Marco Calliari et sa conjointe, ont livré un message émouvant qui représente parfaitement la personnalité joviale et la grande générosité de Gary. Nous trouvions important de le partager à tous ceux qui connaissaient Gary, mais également à tous ceux qui n'ont pas eu la chance de le connaître.
La vie est un grand mystère… et la mort l’est encore plus.
Cette année, la mort semble nous avoir accompagnés quotidiennement. Mais cette fois, cette fatalité va me toucher de près.
Mon cousin.
Quand les gens de la génération qui nous précède commencent à partir et que soi-même on avance en âge, on se pose plein de questions existentielles qui ne nous effleuraient à peu près pas durant notre vingtaine.
Se demander : « Quel legs je laisserai, à ma mort? » Recevoir de la reconnaissance, sentir qu’on a fait une différence auprès des gens, n’est-ce pas un peu une confirmation de son existence? Combien de personne sont mortes dans le plus grand des silences? Cette reconnaissance, n’est-elle pas un peu une preuve que l’on n’a pas raté sa vie? Est-ce une sorte de consolation sur les destins tragiques?
Et je pense à mon cousin.
« Ho un amico svelto proprio comè un longhi », ai-je écrit dans la chanson Ho un amico, voulant résumer par ces simples huit mots le parcours fascinant et la résilience de cet athlète trop peu connu qu’est Gary Longhi. Huit mots : c’était bien peu pour tenter de donner la pleine mesure de ses exploits.
Laissez-moi vous raconter l’histoire de Gary Longhi.
Mon cousin.
Gary est né à Montréal, le 2 juillet 1964. Ma mère Franca et sa mère Ada étaient les deux seules enfants d’une famille de neuf à être venues s’installer au Canada. Quant au père de Gary, Athos Longhi, c’était tout un personnage!
Gary est de 10 ans mon ainé. Nous avons passé notre enfance ensemble. Je passais mes étés avec lui dans leur chalet du Vermont. On faisait du motocross, du go kart, on jouait au croquet, etc. Gary était un enfant espiègle, jovial, et avec un grand sens de l’humour. Lui et son frère Dany avaient une grande fascination pour les machines à moteur. Tout ce qui avait un moteur était minutieusement démonté et précisément remonté.
Gary parle français, anglais et italien et c’est avec lui que j’ai perfectionné mon trilinguisme. Il a toujours été là pour moi, comme un grand frère. Combien de fois il m’a aidé à transporter le matériel d’Anonymus? Il était toujours le premier disponible. Il était là pour reconduire le groupe, pour transporter notre matériel, ou pour réparer mon vélo… Il était du genre à m’offrir un casque pour m’éviter de me casser la gueule!
La vie de Gary a basculé le 11 août 1983 : il a été victime d’un accident de motocyclette, il n’avait alors que 19 ans. Il a sombré dans un coma qui a duré plus de trois mois. Quand il est sorti du coma, Gary ne pouvait plus rien faire, sauf ouvrir les yeux et respirer par lui-même. Pendant sa période de récupération, sa mémoire était « nickel », disait-il, tout comme son sens de l’humour. Mais il a dû réapprendre tout le reste. Gary a subi un violent traumatisme crânien. Son intelligence était intacte, mais son corps ne répondait plus à sa volonté.
À la suite de son accident, ayant dû subir une trachéotomie pendant son coma, cela lui a malheureusement laissé des séquelles importantes. En conséquence, parler et manger en public était devenu pour Gary une source de stress et de gêne. Mais Gary avait gardé ce sens de l’humour si singulier qu’il a alors utilisé pour dédramatiser et évacuer les malaises.
Malgré son handicap, Gary a dédié une partie de sa vie à ses parents. II s’est occupé de son père jusqu’à sa mort en 2010, et est ensuite devenu l’aidant naturel de sa mère, Ada jusqu’à aujourd’hui.
Gary Longhi est maintenant un membre honoraire du Temple de la renommée du cyclisme canadien et pour moi. Il a été intronisé en 2017.
Et comme sa vie n’est pas été un long fleuve tranquille, je me suis demandé si finalement la reconnaissance annonçait-elle aussi une fin abrupte?
Le mois dernier Gary s’est fait diagnostiquer deux cancers. Un curable et l’autre non. Les médecins lui ont donné à peine deux mois à vivre.
Le 2 juillet prochain Gary aura 56 ans.
Savez-vous ce qu’il a demandé comme cadeau d’anniversaire?
L’aide médicale à mourir…
… ça m’a fait réfléchir. À la mort.
Mon cousin.
Et je me suis dit que c’était un beau cadeau. Ne mérite-t-il pas le calme?
N’est-il pas égoïste que de vouloir garder à tout prix nos proches près de nous, malgré leur souffrance?
La grande tristesse serait plutôt de ne pas l’avoir connu de son vivant, et de ne pas avoir été témoin de son parcours impressionnant.
Il fait partie de cette race d’êtres exceptionnels.
Les résilients.
Les « miraculeux ».
Les faiseurs d’impossible.
C’est pour cette raison que j’avais envie de vous partager son histoire.
L’histoire de ce héros.
Mon héros.
Avant son dernier souffle.
Gary a marqué ma vie par sa force, son courage et sa persévérance. Il est un exemple de résilience. Un grand vide se creusera, certes, au départ de ce grand héros, mon cousin. Mais je suis en paix avec son choix. Il mérite cette liberté.
Du lisse.
Du calme.
Du doux.
Et si on se donnait rendez-vous en vélo pour ses derniers moments?
Une perte pour la FQSC
De son côté, le directeur général de la FQSC, Louis Barbeau, a tenu à souligner la personne incroyable qu'était Gary Longhi. À peine quelques instants après la conférence de presse, sa première réaction fut d'avoir une pensée pour son ami de longue date. Gary était beaucoup plus qu'un membre aux yeux de Louis, c'était un ami cher.
Pour l'occasion, Louis Barbeau tenait à vous partager ces mots.
« La vie nous amène à croiser le chemin de nombreuses personnes, mais très rares sont celles qui nous marquent et transforment nos vies. Si j’ai eu la chance de connaître une carrière internationale, d’abord comme assistant-chef de mission et chef de mission avec l’équipe canadienne lors des Jeux paralympiques de Sydney et d’Athènes, et par la suite avec l’Union cycliste internationale pour développer le paracyclisme, c’est en très grande partie grâce à Gary Longhi. N’eut été de son implication comme athlète dans ce sport, je doute fortement que je me serais autant intéressé aux sports pour personnes vivant avec un handicap. Je garderai toujours le souvenir d’une personne généreuse, drôle et résiliente, tout à la fois, qui parvenait à vous faire sourire, peu importe les circonstances. Même s’il ne sera plus présent sur les événements, il restera encore très présent dans nos esprits et nos cœurs. Repose en paix mon ami!»
En ce vendredi 3 juillet, la FQSC ne publiera aucune autre nouvelle. Cette journée est spéciale, elle se doit d'être réservée uniquement à ce pionnier du paracyclisme au Québec. Nous vous invitons à partager vos souvenirs de Gary Longhi en partageant cette publication.
Et comme dirait Gary ... Allez hop Cascades!
Texte sur sa candidature pour le Panthéon du sport du Québec
Natif de Montréal, Gary Longhi a vu sa vie basculer le 11 août 1983, à l’âge de 19 ans, lorsque, victime d’un accident de motocyclette, il sombre dans le coma pour une durée de trois mois. Après un long processus de réhabilitation, cet Italien d’origine entreprend le cyclisme en 1986 lors d’un voyage à Cuba pour courir après les Cubaines, et décide par la suite de s’adonner à la compétition cycliste. À Séoul en 1988, il devient le premier cycliste québécois à prendre part aux Jeux paralympiques, où il obtient une 4e et une 6e place. Lors des Jeux de Barcelone, il décroche sa première médaille paralympique, obtenant l’argent dans le 5 km contre-la-montre. Ses meilleures performances, il les connaîtra toutefois en 1996, à Atlanta, où il remporte le titre paralympique au contre-la-montre en plus du bronze lors de la course sur route. À sa 4e présence aux Jeux paralympiques, à Sydney en 2000, il doit se contenter de la 9e place en raison de problèmes respiratoires. Ses ennuis persistants le contraindront à prendre sa retraite à la fin de 2001
Ce qui distingue Gary Longhi de tout autre athlète, olympien et paralympien, c’est son sens unique de l’humour, combiné à sa grande générosité, sa gentillesse et sa résilience. Il n’est donc pas étonnant que son passage soit remarqué et apprécié de tous. C’est également sans surprise que cet athlète a été honoré de différentes façons au cours de sa carrière, recevant notamment le « prix de l’esprit sportif » lors des Jeux canadiens Forester en 1991, en plus d’avoir été choisi comme porteur de drapeau pour la cérémonie d’ouverture lors des Jeux paralympiques de Sydney en 2000. En 2003, il recevait également la médaille commémorative du jubilé de sa majesté, Elisabeth II, marquant le 50e anniversaire de son ascension au trône, médaille remise aux Canadiens ayant apporté une contribution significative dans leur domaine. L’année suivante, le Temple de la renommée du cyclisme québécois de la FQSC ouvrait ses portes pour la première fois à un paracycliste, une reconnaissance qui revenait inévitablement à Gary Longhi. Finalement, en 2017, il devenait le premier athlète paralympique à être intronisé au Temple de la renommée de Cyclisme Canada, un honneur largement mérité compte tenu de sa carrière et le fait qu’il a été un pionnier du paracyclisme au Québec et au Canada.
Même si sa carrière est terminée depuis de nombreuses années, Gary a continué de s’impliquer pendant plusieurs années dans la promotion du paracyclisme, en siégeant notamment sur le Comité paracyclisme de la FQSC. Finalement, lors des Jeux paralympiques d’Athènes en 2004, il a troqué son vélo pour agir comme agent de service aux athlètes, où une fois de plus sa présence fut appréciée et remarquée de tous.