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L’exploit de Magdeleine Vallières-Mill raconté par ses coéquipières
lundi, 29 septembre 2025
Montréal, 29 septembre 2025 (Sportcom) – La victoire de Magdeleine Vallières-Mill à la course élite féminine des Championnats du monde a pris le monde du cyclisme par surprise samedi. Si la gagnante avait toujours du mal à y croire après l’épreuve, ses quatre coéquipières, elles, n’ont jamais douté en sa capacité à écrire une page d’histoire du cyclisme canadien.
La Sherbrookoise de 24 ans est devenue la première Canadienne à monter sur le podium de la course élite des mondiaux depuis Linda Jackson, médaillée de bronze en 1996, et la première non-européenne à remporter le titre depuis le triomphe de l’Américaine Beth Heiden, en 1980.
Laury Milette, Émilie Fortin et Alison Jackson ont accueilli Vallières-Mill à la ligne d’arrivée après avoir été contraintes à l’abandon. Olivia Baril s’est ajoutée à la fête une quinzaine de minutes plus tard.
L’émotion était palpable et Sportcom a voulu vivre ce moment d’anthologie sous le regard des coéquipières de la nouvelle championne du monde, ainsi que sous celui de Louis Barbeau, directeur général de la Fédération québécoise des sports cyclistes (FQSC).
Émilie Fortin
« S’il existait un titre de championne du monde comme coéquipière modèle, Magdeleine l’aurait déjà gagné. »
On note l’admiration dans la voix d’Émilie Fortin lorsqu’elle revient sur l’exploit de la médaillée d’or. La planète vélo parlait d’une surprise monumentale samedi, mais la Lavalloise de 26 ans croyait fermement aux capacités de sa compatriote. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle a soumis son nom à Cyclisme Canada afin de participer à ses premiers Championnats du monde. Une Canadienne avait la chance d’entrer dans l’histoire et elle souhaitait y contribuer.
« Le monde du vélo a tendance à sous-estimer les coéquipières. Toute l’énergie que tu dois fournir, c’est vraiment dur, mais Magdeleine était capable d’accoter celles pour qui elle travaillait toute l’année. »
En saison, Magdeleine Vallières-Mill joue surtout un rôle de soutien au sein de la formation EF Education-Oatly. Un rôle qu’elle a brillamment tenu à de multiples occasions, notamment à sa quatrième participation au Tour de France.
L’équipe canadienne était unanime au départ de l’épreuve de 164,6 kilomètres : elle allait collaborer pour maximiser les chances de voir Vallières-Mill monter sur le podium à Kigali.
« Il n’y a pas grand monde qui y croyait sauf nous ! On savait ce dont elle était capable et on était prêtes à donner notre course pour sa performance. Si on travaillait ensemble, on avait la chance d’aller chercher un bon résultat », a souligné Fortin.
«Alison Jackson en était à ses 11es mondiaux, alors j’écoutais tout ce qu’elle me disait pour le positionnement de la course. […] Ce n’est pas un parcours qui pardonne et on l’a vécu, mais le but était que Magdeleine reste fraîche, car le parcours lui correspondait bien.»
C’est dans la tente de l’équipe canadienne, les yeux fixés sur le téléviseur, qu’elle a suivi la fin de la course.
« On était sur les nerfs ! On criait et on l’encourageait à distance, même si elle ne nous entendait pas. C’était vraiment beau à voir. »
Laury Milette
« C’était vraiment spécial ! Je ne peux pas dire qu’on ne s’y attendait pas, c’était notre plan dès le départ de tout donner pour elle. On croyait toutes en elle et elle a livré la marchandise. Ç’a été un beau moment, très émotif », a d’abord lancé Laury Milette.
« Quand elle a un objectif en tête, elle va tout faire pour réussir. Elle n’avait qu’une victoire chez les professionnelles avant les Championnats du monde. À mon avis, elle aurait pu en gagner tellement plus, mais elle a souvent le rôle d’équipière. C’est la personne qui le mérite le plus », a-t-elle ajouté.
Milette et Vallières-Mill avaient été coéquipières au tout premier Tour de l’Avenir féminin en 2023, mais ne s’étaient jamais retrouvées au sein du même alignement au cours de leur carrière. Milette avait toutefois entendu de très bons mots à propos de la future championne du monde lors de son arrivée au sein de l’équipe Quebecor-Stingray en 2020.
« Il y a un groupe de Québécoises qui se suivent depuis plusieurs années et on a presque toutes fait le saut en Europe au même moment. Il n’y a jamais eu de doute dans nos têtes depuis 5 ou 6 ans que Magdeleine avait ce qu’il fallait. C’était devenu presque un running gag, mais on avait peut-être vraiment le pressentiment que c’était pour arriver un jour. »
Grâce à cette victoire historique, Laury Milette est d’avis que plusieurs yeux se tourneront davantage vers le cyclisme canadien, mais surtout vers le cyclisme féminin.
« Ça pourra inciter certaines personnes à investir dans le cyclisme au pays parce que clairement, nous avons le talent pour réaliser de grandes choses. En ce moment, c’est parfois difficile de faire le pont entre le Canada et l’Europe. Magdeleine s’est rendue là par elle-même, avec sa détermination et son éthique de travail. J’espère que, grâce à elle, les plus jeunes auront plus de soutien pour se rendre au même niveau qu’elle », a conclu Milette.
Olivia Baril
Olivia Baril a voulu rendre hommage à sa coéquipière qui est allée chercher ce maillot arc-en-ciel « à la pédale ». Elle rejette du revers de la main des commentaires lus dans les médias sociaux, affirmant que Vallières-Mill s’était imposée parce que les favorites avaient été trop passives en fin d’épreuve.
« En réalité, Magdeleine était la mieux préparée et elle est arrivée au-dessus des autres, simplement. Il faut rendre à César ce qui appartient à César », soutient l’ancienne championne canadienne. « Le plus gros rôle qu’on a joué, c’est d’avoir donné de la confiance à Magdeleine. On a toutes regardé les courses cette année et on savait qu'elle était une super domestique, mais qu'une fois qu’elle a sa chance, elle peut vraiment être forte ! »
Dans le circuit du World Tour, l’Abitibienne a l’habitude de se mettre au service de sa meneuse dans son équipe professionnelle. La victoire de sa compatriote, samedi à Kigali, avait une saveur différente.
« Je pense qu'il n'y a aucun moment comparable à celui-là. Mes coéquipières chez Movistar sont cools, mais une Canadienne qui gagne les mondiaux, c'est mieux que n'importe quoi d'autre, parce que ça envoie un message à tout le monde que tout est possible ! C'est super inspirant ! »
Alison Jackson
La première personne qui a félicité Magdeleine Vallières-Mill après sa victoire a été Alison Jackson, sa coéquipière chez EF Education-Oatly depuis 2023. Jackson sautillait impatiemment sur place derrière la ligne d’arrivée avant de lui sauter dans les bras en criant « World Champion ».
Avec le temps, de forts liens d’amitié se sont tissés entre les deux Canadiennes, qui sont souvent cochambreuses lors des voyages de l’équipe.
Championne canadienne en titre et vainqueure sur Paris-Roubaix en 2023, l’Albertaine a été aux premières loges pour voir le travail d’équipière de Vallières-Mill au cours des dernières années, et elle est probablement mieux placée que quiconque pour expliquer à quel point son triomphe aux Championnats du monde est amplement mérité.
« Je connais Mag depuis qu’elle est jeune, j’espère avoir pu l’aider à grandir en tant que cycliste. D’avoir la chance de vivre ce moment à ses côtés, c’est incroyable. Elle est comme ma petite sœur. Je me suis laissée emporter, j’ai sauté au-dessus des barricades pour célébrer avec elle immédiatement », a mentionné Jackson au micro de TNT Sports après la victoire de Vallières-Mill.
« Je suis tellement, tellement fière. Elle est une personne incroyable, elle pense toujours à ses coéquipières, mais c’était son moment cette fois. Elle est championne, la meilleure au monde ! J’ai toujours cru en elle. »
Louis Barbeau
L’impact de cette victoire est déjà immédiat au sein de la communauté cycliste, avance Louis Barbeau, mais aussi dans les livres d’histoire.
« Cette performance-là, c’est la plus belle de l’histoire du cyclisme canadien ! Et j’inclus les autres disciplines cyclistes. C’est fou ! [...] Elle est sur une affiche où tu as Tadej Pogacar à gauche et Magdeleine à droite, les deux champions du monde. Elle n’est pas en mauvaise compagnie, n’est-ce pas ? »
Le directeur général de la FQSC a rapporté à Sportcom la conversation qu’il a eue avec l’entraîneur de Vallières-Mill, Chris Rozdilsky, lundi matin, à propos de l’excellente lecture de la course faite par la Sherbrookoise à cette épreuve disputée sans oreillettes, contrairement aux compétitions du circuit mondial.
« En préparation pour les Championnats du monde, ils ont regardé les différents scénarios possibles afin qu’elle soit en mesure de prendre les bonnes décisions au bon moment. Aujourd’hui, les athlètes sont trop dépendants des instructions des directeurs sportifs faites dans les oreillettes. [...] Elle a fait ses devoirs et elle était très consciente qu’elle aurait à prendre des décisions. C’est un parcours qui était fait pour elle, elle a analysé le niveau de fatigue de ses adversaires et elle a tout exécuté à la perfection ! »
Question d’ajouter encore plus de lustre à ce nouveau maillot arc-en-ciel, il s’agissait d’une des premières fois que Vallières-Mill était la coureuse protégée de son équipe à une compétition majeure, elle qui joue habituellement le rôle de super domestique. Pendant que ses coéquipières l’ont protégée, elle a donc pu conserver ses énergies pour les moments décisifs de l’épreuve.
« C’est elle qui a provoqué la cassure dans l’échappée pour qu’elles se retrouvent à trois en tête de course. Et après, elle est sortie de nouveau. C’était la plus forte. »
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